Le 11 novembre 1940, à Paris, répondant à des appels lancés par le biais d'inscriptions sur les murs et par des tracts diffusés notamment par les communistes, qui entendaient protester contre l'arrestation du physicien Paul Langevin, au moins 3000 jeunes gens, lycéens et étudiants venus des lycées Voltaire, Janson de Sailly, Buffon, Henri IV ou de la Sorbonne, convergeaient vers l'Arc de Triomphe pour rendre hommage au soldat inconnu et commémorer la victoire de 1918. L'administration militaire allemande et les autorités françaises ayant interdit tout rassemblement, la manifestation fut brutalement réprimée, une quinzaine de manifestants étant blessés, un millier interpellés et une centaine d'entre eux arrêtés et emprisonnés. Cet événement est considéré à juste raison comme le premier acte d'opposition publique à l'occupation allemande. Voilà pourquoi, ce matin, Sarko Ier entend rendre un hommage officiel à ces courageux lycéens qui bravèrent les interdictions et les forces d'occupation pour affirmer ouvertement leur attachement à la liberté et à la démocratie. Or cela ne manque pas d'ironie dans la mesure où, il y a un peu plus de trois semaines, les lycéens bloquaient leurs établissements et descendaient dans la rue pour protester contre l'autoritarisme, le déni de démocratie et la brutalité de la politique sociale dont fait preuve le pouvoir sarkoziste, suscitant l'ire de celui qui, aujourd'hui même, entend célébrer le courage et l'esprit de résistance de la jeunesse de France. De ces jeunes, Sarkozy disait en septembre dernier qu'il fallait absolument les "surveiller comme le lait sur le feu". Et quand un mois plus tard ils entraient dans la lutte contre la réforme des retraites, ses plus fidèles courtisans firent corps pour rappeler en choeur à quel point leur place n'était pas dans la rue mais dans les salles de cours. Raymond Soubie, le conseiller antisocial, ouvrait le feu en critiquant ouvertement la participation des jeunes au mouvement. Puis Luc Chatel, redevenu ministre de l'Instruction publique et de la morale, les rappela à l'ordre en leur rappelant à quel point "manifester sur la voie publique est dangereux" et qu'ils prenaient des risques réels à participer à "des actions qui peuvent dégénérer". Mais la francisque d'or revient sans nul doute à Nadine Morano qui, non seulement dénonça violemment dans les médias "les manipulateurs" qui incitaient la jeunesse à descendre dans la rue, mais demanda aux parents d' "empêcher les enfants d'aller manifester" afin qu'ils ne soient pas "mis en danger", et de s'assurer qu'ils "soient au lycée lorsqu'ils doivent être au lycée et ne sortent pas, comme ça, sans autorisation", insistant lourdement sur leur "obligation d'assiduité scolaire". Si Pétain avait disposé de ministres de cette trempe, il n'y aurait certainement pas eu de manifestation le 11 novembre 1940.
jeudi 11 novembre 2010
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire