mardi 9 mars 2010

L'interview de la honte qui attise la colère

Face à la multiplication des recours lancés par les associations de parents d'élèves contre sa personne pour non-remplacements trop fréquents d'enseignants, Chatel a décidé de prendre à bras le corps le problème du non remplacement des absences de courte durée. Mais à quel prix ! Ces solutions sont inadmissibles ! Une agression supplémentaire ! Des jeunes retraités et des étudiants pourraient être sollicités pour remplacer les enseignants absents, ce qui permettrait aux rectorats de se constituer à bon compte des fichiers de contractuels associés qui s'ajouterait à celui des professeurs non titulaires. Pire, il affirme que des étudiants sont capables de prendre en charge n'importe quelle classe, sans aucune formation. Des propos honteux ! Tout le monde le sait : n'importe qui peut "faire le prof" car ce n'est pas un vrai métier. Quant à sa comparaison avec les internes en médecine elle est d'une absurdité totale. Enfin, comme cet incapable n'est pas à une provoc' près, il propose également de pouvoir affecter les titulaires remplaçants dans d'autres académies que celle à laquelle ils sont en théorie rattachés. Une seule chose intéresse le ministre : "mettre chaque jour" des adultes face aux élèves. Peu importe qui ils sont. Peu importe pour quoi faire.

Texte de l'entretien publié aujourd'hui par Le Parisien (http://www.leparisien.fr)
Q. : Ce matin, vous allez demander aux recteurs de se mobiliser pour améliorer les remplacements...
R. Luc Chatel : Il est temps de décréter la mobilisation générale à tous les échelons de l’Education nationale. Je caricature un peu en disant qu’on entend parfois : « Tiens, le prof de musique est absent depuis trois semaines, mais ce n’est pas grave ». Ce ne devra plus être le cas. Il faut se mobiliser pour toutes les disciplines, parvenir au remplacement des enseignants, dans le primaire comme dans le secondaire, dans les délais les plus brefs : enclencher la recherche de solution dès le premier jour.
Q. : Le manque de remplaçants a toujours mécontenté les parents. Mais, ces derniers mois, la tension est montée : forte mobilisation et recours devant le tribunal administratif en Seine-Saint-Denis… La situation s’est-elle donc aggravée ?
R. : Non, et je tiens à ce qu’on évite deux idées fausses. La première serait de considérer que les professeurs sont trop souvent absents. Si l’on regarde les motifs dans le premier degré, qui compte 80 % de population féminine, dans 38 % des cas il s’agit de congés maternité. Deuxième idée fausse : parce qu’à certains endroits il y a de réelles tensions, ponctuelles, considérer que l’ensemble de la machine est grippé. Il n’y a pas de problèmes partout. Mettre chaque jour l’un des 857 000 professeurs devant chacun des 12 millions d’élèves pour assurer 2,5 millions d’heures de cours, c’est une prouesse. Ceci dit, le système actuel est plus efficace pour les absences de plus de quinze jours : 91,3 % en primaire, 92 % dans le second degré. Pour les absences de courte durée, le taux de remplacement n’est que de 19 % dans le second degré ! Or, les trois quarts des absences sont imprévisibles, inférieures à une semaine. C’est là-dessus que nous allons concentrer nos moyens.
Q. : Comment comptez-vous améliorer le système ?
R. : Je veux qu’il devienne plus réactif, mieux structuré et plus souple. Il n’est pas question de le piloter depuis le ministère, mais au plus près du terrain : c’est là qu’on pourra faire du « cousu main ». Je veux que chaque chef d’établissement désigne chez lui un « pilote » chargé du remplacement. Que dès le premier jour d’absence, s’il ne peut pas faire remplacer l’heure manquante par un collègue au sein de son collège ou lycée, il fasse appel au rectorat. Dans chaque académie, il devra également y avoir un interlocuteur dédié à ce seul problème, identifiable par les établissements et les fédérations de parents d’élèves. Parallèlement, d’ici la rentrée, chaque rectorat va devoir améliorer son vivier de remplaçants pour le second degré.
Q. : Pourquoi ? N’y en a-t-il pas assez ?
R. : Oui et non. Cinquante mille des 857 000 professeurs sont des remplaçants titulaires. Il apparaît même que 10 % de ces titulaires en primaire et 20 % dans le secondaire ne sont pas pleinement utilisés. Pour en finir avec ce curieux paradoxe, je souhaite qu’on fasse bouger les frontières académiques. En cas de besoin, le futur responsable de rectorat devra pouvoir appeler son homologue de l’académie voisine : si, à Paris, on manque de remplaçants en maths dans le XIXe ou le XXe arrondissement, il y en a peut-être 3 disponibles à Créteil rattachés à des établissements proches de Pantin ou Bagnolet. Même chose entre Avignon et Villeneuve-lès-Avignon, qui se touchent mais ne font pas partie de la même académie. Ensuite, pour mieux pallier les absences de courte durée, chaque rectorat devra constituer un vivier supplémentaire de contractuels associés : des personnes qui auront déjà été vues par les inspecteurs, et dont on sait qu’on pourra les appeler au pied levé, pour un ou trois jours, de jeunes retraités de l’Education nationale, des étudiants qualifiés ou adultes diplômés.
Q. : Des étudiants ? C’est un sujet sensible : les pensez-vous capables de prendre une classe sans y avoir été formés ?
R. : Mais oui. La pratique, lorsqu’on est en formation, consiste justement à se trouver « en responsabilité » devant une classe. C’est devant les élèves qu’on apprend le mieux à enseigner ! En outre, ces étudiants auront avant bénéficié de stages d’observation avec des profs expérimentés. Nombre de métiers fonctionnent d’ailleurs ainsi : quand vous allez à l’hôpital, le médecin que vous rencontrez est la plupart du temps un étudiant en médecine qui passe une partie de son temps en cours et l’autre face aux malades.

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