lundi 8 mars 2010

Lycées français : un succès... à nos frais

Fort de 250 000 élèves, le réseau des lycées fraçais de l'étranger a enregistré cette année 4 % d'augmentation de ses effectifs.
L'actrice Jodie Foster, le diplomate Boutros Boutros Ghali, l'architecte Ricardo Bofill ou la cinéaste Marjane Satrapi : ces personnalités de premier plan issues du monde entier ont bénéficié de l'enseignement des lycées français de l'étranger dont l'attractivité est aujourd'hui au plus haut. Ce réseau, fort de ses 450 établissements et de ses 250 000 élèves, a enregistré cette année 4 % d'augmentation, selon Anne-Marie Descôtes, directrice de l'Aefe (Agence pour l'enseignement français à l'étranger), dépendant du ministère des Affaires étrangères.
Souvent vilipendé en France, le système scolaire français est plébiscité hors de nos frontières… Selon une enquête menée auprès de parents américains, ces derniers apprécient surtout sa ­rigueur ainsi que l'apprentissage de l'esprit critique qui y est délivré. Ils sont d'autant plus avides d'y inscrire leurs enfants que ces derniers réussissent mieux, ensuite, à l'université que leurs camarades élevés à l'américaine.
L'augmentation des effectifs est particulièrement fulgurante depuis deux ans dans plusieurs pays d'Asie (+ 10 %), en Inde, au Vietnam, en Corée ou en Chine. Cet accroissement s'explique par le fait que les Français sont plus nombreux à s'installer dans ces pays. À l'inverse, les établissements de Moscou, de Prague ou de Tokyo ont perdu quelques dizaines d'élèves à cause du départ de nationaux, lié à la crise financière.
Les Français sont prioritaires pour les inscriptions. Près de 40 % des élèves sont néanmoins étrangers, car les lycées ont aussi une mission d'influence et de rayonnement. Loin devant les différents instituts culturels de l'étranger, ce sont eux qui portent haut les couleurs de la francophonie.
Grand chamboulement dans ce système, depuis 2007, grâce à une promesse de Nicolas Sarkozy, pour les élèves français, l'inscription est gratuite à partir de la classe de seconde, alors que les familles ou, souvent, leurs employeurs finançaient auparavant une scolarité moyenne de 3 500 euros pouvant atteindre jusqu'à 15 000 euros pour le lycée français de San Francisco ! Des sommes s'expliquant par le coût de la vie dans ces pays. Désormais, l'État prend tout en charge, soit 100 millions d'euros par an. L'effet d'aubaine ne s'est pas fait attendre. La hausse des effectifs est essentiellement le fait de familles françaises, notamment à Londres, à Bruxelles, à Madrid, à New York ou dans les pays du Maghreb : des familles franco-marocaines dont les enfants étaient scolarisés dans des «établissements moyens» de la banlieue parisienne ont carrément fait le choix de s'établir au Maroc pour inscrire leurs enfants à Casablanca ou à Rabat dans un des lycées français, connus pour leur excellent taux de réussite au bac et leur environnement protégé. La gratuité les a incités à déménager, affirment-ils ! Mécaniquement, il y a moins d'élèves étrangers dans les établissements. Non prioritaires, ils risquent de servir de «variable d'ajustement», craignent des diplomates. Et les grandes entreprises se désengagent sur un plan financier, explique Anne-Marie Descôtes.
Généreuse dans son principe, cette me­sure peut néanmoins avoir des «con­séquences préoccupantes liées à l'équité et à la discrimination», observe un rapport remis au ministre des Affaires étrangères. À Londres, des familles disposant de revenus annuels compris entre 500 000 et 1 million d'euros bénéficient de la gratuité. «Cette mesure profite par ailleurs à de nombreuses familles sans attache avec la France et non soumises à l'imposition fiscale en France», argue le rapport. À l'inverse, des familles expatriées aux revenus parfois modestes ont aujourd'hui accès à ces établissements. Le débat est donc loin d'être clos. Si le système devenait entièrement gratuit de la maternelle à la terminale - un sujet polémique qui n'est pas encore tranché au Parlement -, la somme prise en charge par l'État avoisinerait, selon certaines sources, de 400 à 500 millions d'euros par an (*).
(source : Le Figaro, 8 mars 2010)
(*) Rappelons en passant que Petit Louis est élève du lycée français de New York.

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