jeudi 10 février 2011

Les couilles du mammouth

Le jeune Luc *, 12 ans, est élève au collège Denis-Diderot de Sorgues, dans le Vaucluse. Il y a peu, il a dérapé et s'est compromis dans une dangereuse histoire de trafic de substances illicites. L'objet du délit : des couilles de mammouth ! Des attributs avec lesquels on ne rigole pas dans l'Education nationale.
Le papa de Luc* est boulanger et il vend dans son échoppe de délicieuses sucreries parfumées au redbull, à la forme évocatrice, qui pèsent 60 g. chacune. De belles baloches disponibles en cinq parfums, à triple épaisseur, qui changent de couleur quand on les suce longuement et qui contiennent un coeur de chewing-gum bien dégueu et qu'on peut mastiquer longtemps. Cette gâterie, inconnue au collège Diderot, suscitant la convoitise de ses condisciples, Luc eut l'idée géniale d'en apporter au bahut pour les vendre. Bon commercial, il commença à les vendre à prix coûtant puis, le succès venant, entrepris de les dealer auprès de ses camarades devenus accros, moyennant un petit bénéfice, tout ce qu'il y a de plus raisonnable. Bon en calcul mental, il rendait même la monnaie sans se tromper, ce qui aurait pu lui valoir les félicitations d'un ministre de l'Education nationale résolu à combattre l'innumérisme.

Mais c'était sans compter sur le zèle d'un principal empêcheur de sucer en rond, exaspéré de voir les élèves la bouche pleine à chaque récréation. Après rapide enquête le coupable fut démasqué et sommé de cracher le morceau devant la CPE. La maman fut convoquée derechef par le principal, désireux de prendre langue avec elle "en urgence", au motif que son fils "avait été interpellé pour trafic de sucettes". De quoi en rester bouche bée. Car trafic il y avait : le truand avait écoulé dans le collège quatre boîtes de 36 sucettes et réalisé un bénéfice de... 28 euros. Bien que le règlement intérieur de l'établissement ne précise pas que la vente de friandises est interdite, Luc* sera déféré le 17 février devant un Conseil de discipline pour avoir pratiqué un "commerce illégal dans l'établissement". "Il ne vend pas du shit tout de même", s'offusque la maman, ébranlée par la "disproportion" de la mesure disciplinaire : "Je sais qu'il risque des jours d'exclusion mais je n'accepterai pas que l'on ne mentionne pas qu'il s'agissait d'un commerce de sucettes. Je ne veux pas que cela le suive toute sa scolarité et que l'on pense qu'il a vendu de la drogue. Oui, il a fait une petite bêtise mais tout ceci est complètement disproportionné. Des heures de colle auraient suffi". Le principal, tout en raideur, assume la mesure au motif que ne pas réagir au trafic de sucettes aujourd'hui, c'est prendre le risque de voir se développer demain un trafic de portables, avec ou sans vibreurs. Attention M. le Principal, si vous vous acharnez à démanteler les réseaux de trafiquants de sucreries avec un tel zèle, votre ministre ne vous en sera pas reconnaissant. Trop de conseils de disciplines, trop d'exclusions, et c'est votre prime de mérite qui sera sucrée. Ne vous entêtez pas trop...

* Le prénom du businessman a été changé.
Le témoignage de la maman :

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