L'Ain aura fait de la résistance pour ces nouvelles évaluations des CM2, décriées par les enseignants depuis des mois. On estime que deux tiers des écoles du département ont envoyé partiellement, ou même pas du tout, les évaluations bilan passées fin janvier, au ministère de l'Éducation nationale. « On peut dire que l'Ain a été un très mauvais élève à ce niveau », estime Pascal Desmaris, représentant du syndicat SE-UNSA.
Du côté de l'inspection académique, le bilan est moindre. « Un certain nombre a fait de la résistance, mais les trois quarts des résultats sont remontés », assure Philippe Sauret, inspecteur d'académie de l'Ain. « Ce que je sais et c'est l'essentiel, c'est qu'au moins 95 % des élèves ont passé ces évaluations, même si elles n'ont pas toutes été renvoyées ». En effet, beaucoup d'enseignants ont suivi le mot d'ordre commun des syndicats : ne faire passer que les items vus en classe.
À l'heure des résultats, dévoilés la semaine dernière, le corps enseignant n'a pas tardé à réagir. Et la contestation est toujours de mise. « Ça pose un vrai problème de crédibilité », déclare Pascal Hennique, secrétaire départemental du Snuipp. « Ce que l'on sait, c'est que 30 % environ des résultats sont remontés, mais qu'on arrive à 75 % au prix de manipulations. Pour ceux qui n'ont fait passer qu'une partie des items, le logiciel n'acceptait pas qu'il y en ait des vides. Alors ces cases vides ont été remplacées par des 1 ou 0, aléatoirement. Donc les résultats ne sont pas fiables », confie Pascal Hennique. Sur ce point, du « défaut » du logiciel, l'inspection académique ne nie pas. « Même si cela a été le cas de manière marginale, ça ne peut pas fausser les résultats, les maîtres ont fait un choix, ils ont fait leur devoir, ça n'est pas de la manipulation », insiste Philippe Sauret.
L'inspecteur d'académie rappelle tout de même à ceux qui estiment que ces évaluations bilan ont été passées trop tôt, surtout que c'est un nouveau programme cette année : « Ce n'est pas scandaleux après deux ans et demi à travailler sur ces acquis, car c'est une évaluation du cycle 3 (CE2, CM1 et CM2), les élèves en sont capables». Philippe Sauret ajoute : « Quelque part, les enseignants, qui n'avaient pas fini de tester le nouveau programme, se sont sentis inquiets que les enfants soient mis en difficulté. On peut les comprendre, ils ont peur de cette nouveauté, mais les évaluations bilan ont toujours existé, bien que celles-ci soient différentes, les résultats se valent. Et on se rend compte du travail efficace des enseignants, fait depuis plusieurs années. Le but premier de ces évaluations ça n'est pas de faire des statistiques, mais que les maîtres aient un outil pour cibler les difficultés de chaque élève ». Pour Pascal Hennique, « c'est important, que le système sache où en sont les élèves et les maîtres aussi, mais ça n'est pas le rôle des évaluations actuelles, c'est de l'auto-célébration ».
Quant aux sanctions, pour le moment, les « désobéisseurs » ne s'en inquiètent pas. « La plus grande sanction, que peut s'infliger un directeur, c'est de ne pas avoir fait passer ces évaluations, de s'être privé pour l'élève de cet outil de travail », confie Philippe Sauret. « J'ai demandé aux inspecteurs de circonscription de rencontrer et de disserter avec eux, de travailler sur la réalité. C'est aujourd'hui que les choses intéressantes vont commencer».
(source : Vannick Berton, Le Progrès, 7 avril 2009)
Les parents d'élèves pour l'évaluation, contre la dévaluation
Suite aux résultats, Marie-Pierre Pras, directrice départementale de la FCPE, déclare : « on n'est pas surpris, mais ces résultats ne veulent rien dire, les remontées n'ont pas été totales, ce n'est donc pas significatif ».
Les parents ne sont évidemment pas contre une évaluation, mais pas de cette manière. « Déjà, les élèves ont été testés sur des notions qu'ils n'ont pas encore vues et cette évaluation intervient quatre mois après le nouveau programme. C'est vraiment n'importe quoi ! », confie Marie-Pierre Pras. Le barème est aussi remis en question par la FCPE. « Ils ont mis en place un barème qui n'était pas prévu, sans nuance. Pour les élèves c'est soit tout juste, soit tout faux, une réponse partiellement correcte est comptée fausse, ça n'est pas normal. Avec ces résultats, un élève peut croire qu'il est mauvais alors, que cela n'est pas vraiment le cas ».
Cette première en matière d'évaluation, n'est donc pas pour les parents une réussite. « Telle qu'elle a été conduite cette année, nous ne sommes pas favorables. Et puis, les élèves sont déjà évalués toute l'année par leurs enseignants », reconnaît la directrice départementale de la FCPE. La fédération de parents d'élèves dénonce à nouveau ces évaluations, qui ne font rien de plus que « pointer les inégalités entre les enfants, et permettent des jeux de comparaison entre les classes et les écoles issues de territoires différents».
La fédération de parents d'élèves a d'ailleurs soutenu toutes les écoles qui ont refusé de faire passer les évaluations, ou qui n'ont pas envoyé les résultats au ministère de l'Éducation. « On ne peut pas demander aux enseignants d'envoyer leurs élèves au « casse-pipe » de gaieté de cœur, quand ils savent que les notions n'ont pas encore été vues». Pour eux, le but d'une évaluation est d'aider le maître à repérer les difficultés de ses élèves et à individualiser le suivi, et non pas de faire « des statistiques inutiles ».
La FCPE a, dans un courrier envoyé à Xavier Darcos en mars, demandé l'abandon de ces évaluations au profit d'évaluations élaborées par la Depp (Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l'Éducation nationale), qui permettraient un réel pilotage du système éducatif. Pour les parents le gouvernement n'a pas convaincu par ces évaluations.
(source : Vannick Berton, Le Progrès, 7 avril 2009)
Les résultats dans l'Ain (source officielle) :
Français : 48 % des élèves ont eu plus de 39 bonnes réponses sur 60 ("acquis très solides") et 5 % des élèves ont eu moins de 20 bonnes réponses ("élèves n'auyant pas les acquis suffisants").
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