Sous le préau, une grande tache noire. Autour d’un poteau, le sol carbonisé. Et puis il y a ces traces de pas, noires elles aussi. Une trentaine d’empreintes très visibles qui tracent une diagonale incertaine dans la cour de récréation, jusqu’à l’entrée d’un bâtiment. Là, d’autres marques d’incendie recouvertes par la texture gluante de la neige carbonique.
Il est environ dix heures, hier matin, dans le lycée professionnel Jean-Moulin de Béziers (Hérault). L’heure de la récréation. Lise B., 44 ans, professeure de mathématiques, vient de lever les bras pour s’asperger la tête et tout le corps d’essence. Une immense flamme jaillit. «Plus de deux mètres», selon un élève qui assisté à la scène. L’enseignante avance, torche vivante, sous les hurlements des lycéens, «en envoyant des bisous de la main», raconte l’une des témoins. «Je fais ça pour vous», aurait-elle articulé. Des lycéens s’écartent, d’autres manquent de s’évanouir. Un jeune homme tente de la mettre à terre. Un autre lance sa veste. «Les cris des filles étaient comme ceux qu’on entend à la télé quand il y a une vedette. On n’a pas compris…», rapporte une dame de service. C’est finalement un extincteur qui viendra à bout des flammes. La professeure est aussitôt transportée à l’infirmerie. Elle n’a plus de cheveux, son visage est ravagé. Elle tente de refuser les premiers soins. Dans les couloirs de cet établissement des années 70, totalement décati, «l’odeur d’essence et de tissus brûlés est alors insoutenable».
Peu avant son geste, l’enseignante avait assuré une heure de cours, de 8 heures à 9 heures. A ses élèves à qui elle a rendu des copies, elle a répété, selon un membre de l’établissement : «Ne vous inquiétez pas, tout va bien se passer.» Personne n’a vraiment compris pourquoi, car les notes étaient dans l’ensemble médiocres. Puis elle s’est fait porter absente pour son cours suivant de 9 heures à 10 heures, jusqu’à son geste funeste.
Hier après-midi, le pronostic vital de l’enseignante n’était plus engagé, selon le procureur de la République de Béziers, Patrick Mathé. Pour lui, c’est une «tentative de suicide en lien avec l’activité professionnelle». «Il se dit en effet qu’elle avait des soucis avec ses classes, confirme Sabine, mère d’une lycéenne scolarisée au lycée Jean-Moulin, qui a assisté au drame. Il y avait des cris dans sa classe. Ma fille, qui avait souvent cours à côté, les a entendus. De là à expliquer son geste…»
Il est environ dix heures, hier matin, dans le lycée professionnel Jean-Moulin de Béziers (Hérault). L’heure de la récréation. Lise B., 44 ans, professeure de mathématiques, vient de lever les bras pour s’asperger la tête et tout le corps d’essence. Une immense flamme jaillit. «Plus de deux mètres», selon un élève qui assisté à la scène. L’enseignante avance, torche vivante, sous les hurlements des lycéens, «en envoyant des bisous de la main», raconte l’une des témoins. «Je fais ça pour vous», aurait-elle articulé. Des lycéens s’écartent, d’autres manquent de s’évanouir. Un jeune homme tente de la mettre à terre. Un autre lance sa veste. «Les cris des filles étaient comme ceux qu’on entend à la télé quand il y a une vedette. On n’a pas compris…», rapporte une dame de service. C’est finalement un extincteur qui viendra à bout des flammes. La professeure est aussitôt transportée à l’infirmerie. Elle n’a plus de cheveux, son visage est ravagé. Elle tente de refuser les premiers soins. Dans les couloirs de cet établissement des années 70, totalement décati, «l’odeur d’essence et de tissus brûlés est alors insoutenable».
Peu avant son geste, l’enseignante avait assuré une heure de cours, de 8 heures à 9 heures. A ses élèves à qui elle a rendu des copies, elle a répété, selon un membre de l’établissement : «Ne vous inquiétez pas, tout va bien se passer.» Personne n’a vraiment compris pourquoi, car les notes étaient dans l’ensemble médiocres. Puis elle s’est fait porter absente pour son cours suivant de 9 heures à 10 heures, jusqu’à son geste funeste.
Hier après-midi, le pronostic vital de l’enseignante n’était plus engagé, selon le procureur de la République de Béziers, Patrick Mathé. Pour lui, c’est une «tentative de suicide en lien avec l’activité professionnelle». «Il se dit en effet qu’elle avait des soucis avec ses classes, confirme Sabine, mère d’une lycéenne scolarisée au lycée Jean-Moulin, qui a assisté au drame. Il y avait des cris dans sa classe. Ma fille, qui avait souvent cours à côté, les a entendus. De là à expliquer son geste…»
D’après des parents d’élèves, la professeure, qui enseignait depuis sept ou huit ans dans la filière générale de cette cité scolaire accueillant plus de 3 000 élèves et 280 enseignants, était en conflit avec certains jeunes, qui la trouvaient trop sévère. Une tentative d’explication, mercredi, avec certains élèves, aurait été «mal vécue» par l’enseignante, selon des témoins interrogés par l’AFP.
Lise B. rencontrait également des difficultés personnelles, ce qui avait conduit le proviseur du lycée à lui proposer récemment de se mettre en arrêt maladie.
«Nous ne voulons pas nous prononcer sur sa vie privée, et nous n’avons pas eu de confirmation sur l’existence de cette réunion houleuse, mais il est certain que le choix du lieu pour effectuer un tel acte n’est pas neutre, commente Jean-Luc Vaïsse, secrétaire départemental du syndicat d’enseignants SE-Unsa. Le problème, c’est que son mal-être, probablement à la fois personnel et professionnel, n’a pas été détecté. Depuis 2008, je répète que les enseignants ne sont soumis à aucune visite médicale. Il n’y a pas de suivi des personnels de l’Education nationale. Ils ne sont pas accompagnés. Les cellules psychologiques de crise, c’est bien, mais quand elles sont mises en place, il est trop tard !»
Venu en fin d’après-midi rencontrer la direction du lycée, le ministre de l’Education nationale, Luc Chatel, a déclaré : «L’enquête déterminera le détail de la situation et ce qui a pu la pousser à un geste désespéré comme celui-ci.» La cellule de crise installée dans la cité scolaire, qui a reçu environ 80 élèves hier, accueillera aujourd’hui les enseignants qui le souhaitent. Pour les écouter et les aider à trouver les mots face à leurs élèves.
Lise B. rencontrait également des difficultés personnelles, ce qui avait conduit le proviseur du lycée à lui proposer récemment de se mettre en arrêt maladie.
«Nous ne voulons pas nous prononcer sur sa vie privée, et nous n’avons pas eu de confirmation sur l’existence de cette réunion houleuse, mais il est certain que le choix du lieu pour effectuer un tel acte n’est pas neutre, commente Jean-Luc Vaïsse, secrétaire départemental du syndicat d’enseignants SE-Unsa. Le problème, c’est que son mal-être, probablement à la fois personnel et professionnel, n’a pas été détecté. Depuis 2008, je répète que les enseignants ne sont soumis à aucune visite médicale. Il n’y a pas de suivi des personnels de l’Education nationale. Ils ne sont pas accompagnés. Les cellules psychologiques de crise, c’est bien, mais quand elles sont mises en place, il est trop tard !»
Venu en fin d’après-midi rencontrer la direction du lycée, le ministre de l’Education nationale, Luc Chatel, a déclaré : «L’enquête déterminera le détail de la situation et ce qui a pu la pousser à un geste désespéré comme celui-ci.» La cellule de crise installée dans la cité scolaire, qui a reçu environ 80 élèves hier, accueillera aujourd’hui les enseignants qui le souhaitent. Pour les écouter et les aider à trouver les mots face à leurs élèves.
(Source : Libération, 14 octobre 2011)
A la mi-journée, les collègues de l'enseignante avaient lu, devant les grilles du lycée, un message de "solidarité pour Lise", brandissant de petites pancartes blanches intitulées "Plus jamais ça", "On veut des actes". "Hier, une enseignante a choisi de s'immoler dans la cour du lycée à l'heure de la récréation. Cet acte symbolique nous bouleverse et nous interroge tous", avaient déclaré les 280 professeurs du lycée dans ce communiqué. "Son geste appelle à la solidarité de l'ensemble des personnels et témoigne de notre difficulté à accomplir notre mission. Nous attendons donc l'engagement responsable de nos autorités", ajoutaient-ils.
Interrogé par l'AFP à la nouvelle du décès, l'un d'eux, Christophe Quittet, a annoncé la tenue d'une "marche blanche" lundi à 14 h au départ de l'établissement. Selon lui, les cours ne reprendront pas lundi matin, en vertu d'un droit de retrait éventuellement reconductible.Si ses collègues se veulent prudents sur les raisons de cet acte, l'un d'entre eux estimait jeudi soir, sous couvert de l'anonymat, que la "pression ambiante était peut-être trop forte" et qu'"une écoute aurait peut-être évité ce passage à l'acte" (...).
"Au cours des années, on a vu le métier évoluer, le public changer, les réformes arriver, des réformes nécessaires mais bien souvent menées à l'emporte-pièce, sans discernement, dans l'urgence, et à un moment donné il peut arriver ce genre de geste", confiait-il.
Au niveau national, le Snes, premier syndicat du secondaire, a réclamé un "débat" sur le métier d'enseignant après cette "tragédie". Il souhaite notamment "interpeller le ministre sur l'importance de la mise en place d'une véritable médecine du travail dans l'Education nationale" et l'amélioration des "conditions générales de travail des enseignants, dont la pénibilité s'est considérablement accrue ces dernières années".
Interrogé par l'AFP à la nouvelle du décès, l'un d'eux, Christophe Quittet, a annoncé la tenue d'une "marche blanche" lundi à 14 h au départ de l'établissement. Selon lui, les cours ne reprendront pas lundi matin, en vertu d'un droit de retrait éventuellement reconductible.Si ses collègues se veulent prudents sur les raisons de cet acte, l'un d'entre eux estimait jeudi soir, sous couvert de l'anonymat, que la "pression ambiante était peut-être trop forte" et qu'"une écoute aurait peut-être évité ce passage à l'acte" (...).
"Au cours des années, on a vu le métier évoluer, le public changer, les réformes arriver, des réformes nécessaires mais bien souvent menées à l'emporte-pièce, sans discernement, dans l'urgence, et à un moment donné il peut arriver ce genre de geste", confiait-il.
Au niveau national, le Snes, premier syndicat du secondaire, a réclamé un "débat" sur le métier d'enseignant après cette "tragédie". Il souhaite notamment "interpeller le ministre sur l'importance de la mise en place d'une véritable médecine du travail dans l'Education nationale" et l'amélioration des "conditions générales de travail des enseignants, dont la pénibilité s'est considérablement accrue ces dernières années".
(Source : Le Midi Libre, 14 octobre 2011)
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