vendredi 4 mars 2011

Malaise à l'école

Deux professeurs se sont donné la mort en Basse-Normandie depuis janvier. Le débat sur les conditions de travail est relancé.
« Depuis début janvier, dans la seule académie de Caen, plusieurs personnes enseignants ou personnels ont mis fin à leurs jours ou ont tenté de le faire ». En s'adressant dans une lettre au ministre de l'Éducation, Luc Chatel, les enseignants du lycée Charles-Tellier de Condé-sur-Noireau (Calvados) évoquent le suicide d'un collègue début février. Mais aussi le décès, mi-janvier, d'un instituteur de la région de Granville (Manche) et la tentative de suicide d'un agent de service d'un lycée caennais qui avait évoqué « d'importants problèmes avec la hiérarchie », selon Michel Lelarge, un représentant du syndicat Sud.
Les enseignants savent bien qu'« il est nécessaire de faire la part des choses, dans un tel drame, entre le travail et la vie privée », tempère Jean-Marie Thomine, assistant social des personnels dans le Calvados. Le ministère de l'Éducation nationale indique : « Sans qu'il soit possible d'établir un lien avec les conditions de travail, 52 suicides ont été recensés entre 2008 et 2009 sur une population de 850 000 enseignants, soit 6 suicides pour 100 000 enseignants ». En 2001, toujours selon la même source, cette proportion était de 30 pour 100 000 chez les policiers. Des chiffres que les syndicats demandent sur le plan local « depuis des années, mais sans succès », regrette Sylvian Mary, secrétaire départemental de la FSU dans le Calvados.

Au-delà des drames qui touchent des familles et des équipes, les enseignants s'interrogent sur les suppressions de postes, le sens de leur travail, l'évolution de leur métier, les tâches administratives toujours plus lourdes... « On nous demande la culture de la performance, avec moins de monde, moins de matériel. Ce n'est pas valorisant », remarque un enseignant de la Manche. Il reconnaît les difficultés de la profession « à s'adapter dans la morosité ambiante » et « un besoin de vider son sac avec, parfois, de l'agressivité dans les réunions internes ».
Le rectorat de Caen « ne nie pas le malaise », mais ne fait pas d'autre commentaire. Au ministère de l'Éducation, qui emploie près de 2 800 assistants sociaux, on rappelle que les comités d'hygiène et de sécurité vont bientôt se saisir des conditions de travail et des risques psychosociaux. Quelque 80 médecins prévention devraient être recrutés. Luc Chatel s'exprimerait sur ce malaise des enseignants dans les prochains jours.

(source : Ouest-France, 4 mars 2011)

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